L'épopée d'une adaptation
Dix ans. Il a fallu dix longues années pour que le roman devienne le film que nous connaissons (comme pour Apocalypse Now que Coppola commence à imaginer en 1969).
Pourtant, en 1972, tout semblait bien parti. À peine publié, la Columbia s’empressait d’acheter les droits, avec en tête un réalisateur de renom : Richard Brooks. La suite ? Une succession de scénaristes et de réalisateurs qui se sont refilé le projet comme une grenade dégoupillée, et un sacré défilé de stars : Clint Eastwood, Al Pacino, John Travolta, Robert De Niro… Autant de prétendants séduits par la puissance du personnage, mais qui, pour diverses raisons, n’ont jamais franchi la ligne.
Ce sont finalement deux producteurs hongro-libanais, totalement novices à Hollywood, qui auront le culot d’emprunter plusieurs millions de dollars et de parier sur un étalon italien pour porter ce roman à l’écran.
Suivre l’épopée de cette adaptation — passée entre les mains de nombreux scénaristes — est en soi un récit captivant. Entre suppressions, ajouts de scènes, doutes, trouvailles et recherches de concision, c’est tout un processus de transposition vers le cinéma qui se dessine. Et c’est en examinant ces choix que le film se révèle sous un jour nouveau.
Ce parcours est d’autant plus fascinant qu’il traverse toute une décennie : les années 70. Une époque hantée par la guerre du Vietnam, où l’Amérique et Hollywood cherchent à panser leurs plaies à travers des récits puissants, sombres, souvent ambigus. Explorer cette adaptation, c’est aussi plonger dans l’histoire du cinéma américain par le prisme de la représentation du conflit vietnamien.